SDBR News : L’entrée dans votre capital d’Andera Partners, de BPI France et de Tikehau Capital signifie t’elle le changement de dimension de MC2-Technologies ?

Nicolas Vellas : La société date de 2004 et c’était la première start-up de l’Université de Lille1dans le domaine de la microélectronique hyperfréquence. Nous avons ensuite fait entrer la mécanique et l’informatique dans notre savoir-faire, et nous sommes plus de 90 collaborateurs aujourd’hui. Effectivement, en 2021 nous avons fait entrer de nouveaux actionnaires et fait sortir un actionnaire étranger pour stabiliser un actionnariat purement français.

SDBR News : MC2-Technologies est-elle donc une pépite française selon l’expression consacrée ?

Nicolas Vellas : Aujourd’hui nous travaillons sur deux grands sujets :

• le domaine de la Défense et notamment la lutte antidrone ; nous développons des solutions pour neutraliser les drones, la menace drone étant devenu un nouveau paradigme de la guerre comme on le constate en Ukraine. Nous avons développé des solutions permettant de détecter, identifier et neutraliser les minidrones et les nanodrones : MAJES et NEROD.

• Le domaine de la Sécurité : nous avons développé une caméra hyperfréquence permettant de voir à travers les vêtements. Cette caméra a la particularité de pouvoir scanner des personnes qui se déplacent, contrairement aux « body scanners » des aéroports par exemple : le scan en mouvement permet de détecter la présence d’une menace mais aussi d’éviter la formation de file d’attente. C’est une des valeurs ajoutées de notre produit MM-IMAGER qui n’a pas aujourd’hui de concurrent équivalent dans le monde.

SDBR News : Lors de l’augmentation de capital de MC2-Technologies, une activité de télécommunication sécurisée à très haut débit a été évoquée. Est-elle toujours d’actualité ?

Nicolas Vellas : C’est un sujet toujours d’actualité mais plus amont, car les produits ne sont pas encore commercialisés. Des travaux de recherche appliquée à ce domaine sont réalisés dans le cadre de programmes, avec différents types de partenaires français. L’objectif est de développer de nouvelles solutions de transmissions de données point à point et sans fil, à très haut débit et sécurisées, sans passer par les techniques de type fibre optique ou autres. Cet objectif (2025/2026) répondra à différentes problématiques et notamment aux besoins futurs de la 6G. C’est une solution qui intéressera la Défense, pour neutraliser ou se protéger contre la guerre électronique : notamment pour éviter de voir ses données interceptées ou brouillées.

SDBR News : Revenons à la lutte antidrone. Vous n’êtes pas seuls sur ce créneau…

Nicolas Vellas : Ce qui nous différencie d’autres acteurs du marché, c’est que nous avons la maitrise complète de la fabrication en France de nos produits. Nous sommes des experts du domaine des hyperfréquences et nous maitrisons la conception de nos produits du début à la fin, ainsi que leur production. Nos concurrents importent des technologies qui proviennent de l’Étranger (Israël, Chine) et les intègrent en France, ce qui est différent de notre modèle qui s’inscrit dans le cadre de la Souveraineté en maitrisant la chaine de valeur du produit. Aujourd’hui, nous fournissons au ministère des Armées et au ministère de l’Intérieur des solutions de neutralisation de drones par brouillage. Dans le marché PARADE (Protection déployAble modulaiRe Anti-DronEs), qui a été gagné par Thales et CS Group, MC2-Technologies est le fournisseur de la solution de brouillage. Nous sommes partenaires du groupe Thales sur différents sujets.

SDBR News : Mais n’êtes-vous pas aussi concurrents du groupe Thales sur le brouillage ?

Nicolas Vellas : En effet nous sommes concurrents, mais les solutions développées par MC2-Technologies apportent une plus-value technologique étant de dernière génération. C’est la raison pour laquelle ils sont venus nous voir et que nous avons gagné ensemble l’appel d’offre du ministère de la défense français. Nous fournissons par ailleurs le ministère de l’intérieur français et, à l’Export, nous avons fourni 300 fusils brouilleurs au ministère de l’intérieur japonais pour sécuriser les JO de Tokyo, ce qui est un gage de qualité et de compétitivité.

SDBR News : Y a t-il un différenciant technologique entre MC2-Technologies et ses concurrents, et le fait de produire en France vous permet-il d’être compétitif en prix ?

Nicolas Vellas : Pour certains produits, nous serons plus chers qu’un concurrent français qui achète tous ses modules en Asie, c’est certain. Mais nous amenons dans nos produits des niveaux de qualité et de performance supérieurs. La qualité se paie. Progressivement, les marchés publics français demandent la justification d’une production sur le sol français d’au moins 50% de l’ensemble, or nous avons la maitrise de toute la chaîne de valeur de nos produits, ce qui fait notre force. D’ailleurs beaucoup de groupes français nous sollicitent aujourd’hui pour le développement et la production de leurs propres modules.

SDBR News : Combien de produits présentez-vous pour la lutte antidrone ?

Nicolas Vellas : Nous avons beaucoup parlé des brouilleurs, mais nous avons aussi développé des dispositifs de détection qui fonctionnent dans des zones fortement peuplées, contrairement à certains concurrents dont les systèmes fonctionnent surtout dans les zones faiblement peuplées. Nos systèmes de détection fonctionnent à longue distance, malgré des environnements urbains pollués par les signaux provenant des systèmes de télécommunication, du wifi, Bluetooth, etc. Nous avons mis au point un système intelligent d’analyse de l’environnement RF MERCAT (disponible en avril 2023) qui sera aussi mobile que la Menace telle qu’on l’observe sur les théâtres aujourd’hui. MERCAT ne nécessite qu’un mat de détection (et non pas plusieurs pour trianguler) ; le système de brouillage peut-être mobile sous la forme de fusil ou d’un système très compact et intelligent pouvant être embarqué sur véhicule ; enfin un radar MATIA, développé dans le domaine Térahertz, exprès pour la détection et l’identification des drones.    

SDBR News : Quel atout technologique apportez-vous dans le scan des personnes qui se déplacent?

Nicolas Vellas : Notre solution MM-Imager est un système passif, c’est à dire qu’il n’émet aucune onde et ne représente donc pas un danger pour ses utilisateurs. Nous avions développé un capteur ultrasensible aux ondes millimétriques (~ 90GHz) dégagées par le corps humain avec le support de la DGA il y a 10 ans dans le cadre d’un programme de recherche. Ensuite, nous avons développé une matrice de capteur et enfin un système d’imagerie complet pour identifier en temps réel, sur les personnes en mouvement, la présence d’objets suspects non apparents : le MM-Imager. Si vous avez un objet sur vous, l’objet va émettre de façon différente du corps humain et modifier le rayonnement du corps : par différence on verra apparaitre l’objet. Grâce à l’IA, aujourd’hui le système est capable d’identifier et de situer l’objet détecté avec un résultat de 80 à 90%. Le système MM-Imager est une caméra qui détecte tous les objets cachés (métalliques ou non) sur des personnes en mouvement, avec des capacités en termes de détection, de champ de vision, de qualité d’image qui sont à l’état de l’art. Les menaces sont affichées à l’écran grâce aux algorithmes de traitement d’image développés sur-mesure. Ce système compact et performant fluidifie les contrôles ce qui évite des attroupements susceptibles de représenter un risque. Aujourd’hui nous vendons 95% des MM-Imager en Chine. Nous espérons que notre système sera utilisé lors des Jeux olympiques de Paris en 2024.

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Crédits photos: MC2-Technologies