Interview de Xavier Montazel - CNIM Systèmes Industriels

L’interview de Xavier Montazel *a été réalisée lors du salon Eurosatory 2022

SDBR News : Quel est le périmètre actuel des activités systèmes industriels du groupe CNIM Systèmes Industriels* ?

Xavier Montazel : CNIM systèmes industriels regroupe les activités du groupe au profit de la Défense, du Nucléaire et de l’Industrie en réalisant une centaine de millions d’euros de chiffre d’affaires (hors CNIM Air Space). Ces activités vont continuer à exister sous un autre pavillon français, lorsque la période de protection judiciaire, commencée le 24 janvier 2022 et convertie le 14 mars en procédure de redressement judiciaire, verra se concrétiser le plan de cession annoncé le 05 avril 2022 par le tribunal de commerce de Paris.

SDBR News : Quelle votre actualité** dans le secteur Défense ?

Xavier Montazel : Nous sommes présents sur les trois activités principales de la Défense :

• la dissuasion au profit de l’armée française, via Naval Group, pour les systèmes de lancement présents et futurs des missiles stratégiques des SNLE ;

• les équipements navals conventionnels, au travers des navires amphibies de type EDAR (en service) et EDAS dont nous avons livré les deux premiers exemplaires en novembre 2021 ; nous faisons aussi des équipements pour les navires de combat au travers des chantiers navals européens, dont Naval Group et Fincantieri : systèmes d’ouvrants critiques et de grande dimension (par exemple pour les torpilles ou les sonars), systèmes de transfert et manutention complexes (munitions ou missiles), plateformes élévatrices de forte charge opérant dans des environnements aux conditions extrêmes ;

• le terrestre, essentiellement au profit du Génie en fournissant des systèmes particuliers pour leur permettre de réaliser l’ensemble de leurs opérations : franchissement avec la nouvelle version F3 du PFM qui lui donne une capacité accrue de franchissement (sur semi-remorque ou sur 8x8) et avec lequel nous venons de remporter un appel d’offres en Pologne ; le Sprat en service dans l’armée française et deux autres solutions pour le Génie : le Rocus et l’ECG.

SDBR News : Quelle est la mission du Rocus ?

ROCUS - CNIM Systèmes industriels

Xavier Montazel : Le Rocus (Route Clearance Unmanned System) est une solution d’ouverture d’itinéraire basée sur la plateforme THeMIS de Milrem Robotics afin de répondre aux besoins de sécurisation des convois militaires sur le théâtre d’opérations, en particulier contre les engins explosifs improvisés. Le Rocus est un véhicule non habité, chenillé et piloté à distance par les sapeurs qui sont ainsi éloignés de la zone piégée (jusqu’à 400 mètres de distance). Doté d’une interface instinctive et d’un mode Bird View (pilotage hors de vue), le Rocus est facile à mettre en œuvre et à opérer. Il a 10h d’autonomie. Son bras manipulateur de 4m de long lui permet de soulever des charges jusqu’à 100kg. En France, le programme Robin devrait être lancé en fin 2022 par la DGA, pour équiper l’armée française du successeur du système Bufalo, avec une plateforme téléopérée.

SDBR News : Et pour l’EGC ?

EGC - CNIM Systèmes industriels

Xavier Montazel : L’Engin du Génie de Combat (EGC) sera amené à remplacer l’EBG chenillé en service dans les armées françaises aujourd’hui. L’EGC sera un véhicule d’aménagement du terrain, de type 8X8, qui sera également capable de fournir un appui à la manœuvre aux unités de mêlées en s’intégrant aux véhicules Scorpion, avec une grande mobilité et une grande capacité de travail sur zone. Blindé et armé, l’EGC sera apte à l’appui au combat de contact en zone urbaine ou en haute intensité tout en assurant une protection aux trois membres d’équipage. Il aura la même capacité de franchissement que les véhicules Griffon qui l’accompagneront et sera doté de 80km/h de vitesse de pointe et de 600km d’autonomie pour une masse 28 tonnes. Aérotransportable, l’EGC pourra être envoyé en OPEX, en A400M, et pourra intervenir à la fois en zones de conflits mais aussi en cas de catastrophes naturelles pour déblayer le terrain. Sur ce projet CNIM Systèmes industriels est associé à Texelis, qui fournit entre autres la base roulante du Serval de Nexter, et à Nexter qui assurera la « scorpionisation » du véhicule et son maintien en condition opérationnelle (MCO).

SDBR News : Quelle est la différence du PFM F3 par rapport à ses prédécesseurs F1 et F2 ?

Xavier Montazel : Le PFM F3 garde le principe des F1 et F2, à savoir des moteurs embarqués, pas de bateau pousseur et une très grande facilité de mise en œuvre. Mais il présente deux grandes différences :

PFM - CNIM Systèmes industriels

• il augmente sa capacité de franchissement avec une capacité de charge MLC 90 Tracked et MLC 100 Wheeled qui permettent le franchissement en toute sécurité de tous les types de véhicules des forces armées présents et à venir, y compris les chars lourds (Abrams M1A2 SEPV3, Leopard 2A7, Challenger rénové, Leclerc rénové, MGCS).

• Il peut être déployé soit à partir de semi-remorques sur des modules de 10 mètres, soit sur véhicules 8x8 avec des modules de 7 mètres de long (ce qui nécessite donc plus de véhicules pour la même longueur de franchissement). Beaucoup de pays préfèrent utiliser des véhicules 8x8 standards pour l’ensemble de leurs opérations logistiques, par exemple la Hollande ou la France pour de futurs appels d’offres.

Le PFM F3 se présente comme la solution la plus flexible du marché et, afin d’apporter une réponse sur-mesure à chaque besoin client, il est proposé sous des configurations multiples.

SDBR News : Revenons sur l’EDAS. Quel est l’actualité de ce navire amphibie ?

Xavier Montazel : Comme je le disais, nous avons livré les deux premiers EDAS en novembre 2021 à la Marine française et ils sont en service aujourd’hui à bord des BPC, comme chalands de débarquement transportés en radiers. Sur un programme de 14, il en reste donc 12 à livrer ; les 4 prochains seront livrés en 2023. L’EDAS peut transporter 80 tonnes de matériels à 11 nœuds en charge (13 nœuds à vide), soit deux fois la vitesse des CTM utilisés actuellement. Il a une capacité roll on / roll off, c'est-à-dire déchargeable indifféremment par l’avant ou par l’arrière du navire. Nous avions un projet en Australie qui, comme vous le savez, a subi des aléas politiques. Il y a peu d’opportunités pour l’EDAS pour l’instant à l’international, mais cela peut changer. Nous avons présenté tous les matériels dont nous venons de parler, hormis l’EDAS sur le salon Eurosatory 2022.

* Xavier Montazel est Directeur de la Business Unit Défense chez CNIM Systèmes Industriels  https://cnim.com 

**A lire aussi interview de Xavier Montazel en septembre 2020 : https://www.sdbrnews.com/sdbr-news-blog-fr/sq0gaqqb2f6xzkss5k10vxj3mlre8b?rq=montazel

Crédits photos: CNIM