Les Vœux du GICAN pour 2025

Le 10 janvier 2025, le GICAN avait organisé ses traditionnelles « Rencontres de l’Industrie navale », l’occasion aussi pour Pierre Eric Pommellet son Président – par ailleurs Président de Naval Group – de présenter ses vœux aux membres du Gican et à la Presse.

Les chiffres clés de la filière navale française (base 2023)

La filière navale comprend l'ensemble des entreprises participant à la construction, l'équipement, la réparation et la transformation de navires servant les « 5 marines » : défense, marine marchande, pêche, recherche et bateaux de plaisance (d'une longueur supérieure à 24 mètres).

La filière navale en France, prenant en compte les donneurs d’ordre et les sous-traitants de rang 1, représente 15,1 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 127.000 emplois, répartis essentiellement sur 5 régions françaises : 56.100 emplois directs (rang 1), 37.400 emplois indirects (rang 2) et 33.650 emplois induits (ceux liés à la consommation des ménages directement et indirectement liés aux industriels du secteur naval). 

87,1% des emplois de la filière sont concentrés sur 5 régions (qui représentent aussi 85% de son chiffre d’affaires): Pays de Loire 20,7%, Bretagne 19,1%, PACA 17,5%, Ile de France 16,6% et Normandie 13,2%. Décrochée du peloton de tête mais significative, vient ensuite la région Nouvelle Aquitaine avec 3,6% des effectifs et environ 2000 emplois directs. Les 6 autres régions sont en dessous de 2%.

  • Pays de Loire - 138 établissements, 11.637 emplois directs, 7.750 emplois indirects et 2 gros pôles industriels : Saint-Nazaire, avec les Chantiers de l’Atlantique et Naval Group, et Nantes.

    En termes d’actualité, soulignons le projet PICCARD qui vise à développer de nouveaux capteurs électromagnétiques et optiques intégrables sur des ROV et AUV capables d’opérer jusqu’à 6000 mètres de profondeur.

  • Bretagne - 158 établissements, 10.691 emplois directs et 7.120 emplois indirects sur 3 sites principaux : Brest, Lorient avec Naval Group et Concarneau avec Piriou.

    En termes d’actualité, RTsys – Underwater Accoustics and Drones - travaille sur le projet MARTOC pour développer une solution autonome de détection, de suivi et de contrôle des câbles sous-marins, basée sur un drone sous-marin capable d’opérer à 3.000 mètres de profondeur.

  • PACA - 151 établissements, 9.818 emplois directs et 6.539 emplois indirects, avec un gros pôle en rade de Toulon : Naval Group, CNIM, Exail, etc. A noter, en 2027, l’ouverture prévue à La Londe-les-Maures d’un site Naval Group de 550 personnes, dédié aux drones et aux armes sous-marines.

  • Normandie – 82 établissements, 7.399 emplois directs et 4.928 emplois indirects, essentiellement concentrés sur Cherbourg : Naval Group, Constructions Mécaniques de Normandie (CMN), etc. L’actualité concerne essentiellement les 4 sous-marins NG à livrer à la marine néerlandaise.

  • Nouvelle-Aquitaine – 48 établissements, 2.035 emplois directs et 1.355 emplois indirects. Des synergies commencent à se développer entre la filière aéronautique, très présente en Aquitaine, et les activités navales. A noter que le chantier Couach a livré ses premiers navires de sauvetage hauturier (NSH1) et en a vendu un à l’étranger.

porte avion us gerald ford

Le Naval de Défense dans le monde

Sur la base des chiffres connus au 01/01/2024, en nombre et en tonnage* total des navires de combat en service, ce sont la Chine et les Etats-Unis qui se livrent à une compétition, au moins sur le papier, pour avoir la 1ère place du classement des Marines du monde:

  • États-Unis : 246 navires et 3.222.017 tonnes à pleine charge

  • Chine : 455 navires mais seulement 1.300.311 tonnes

La Russie, qui se classait encore 2ème en 2018, a reculé à la 3ème place avec 259 navires en service et 925.034 tonnes : 14 sous-marins stratégiques, 59 sous-marins d’attaque, 65 grands bâtiments de combat, 54 petits bâtiments de combat et 36 bâtiments de guerre des mines. Donc une Marine à ne pas sous-estimer…

marine chinoise

Le Japon compte 109 navires en service pour 402.620 tonnes : 7 porte-aéronefs, 24 sous-marins d’attaque, 47 grands bâtiments de combat et 24 bâtiments de guerre des mines. Donc une Marine militaire qui pourrait faire mal, en cas de conflit avec son grand voisin expansionniste la Chine !

Le Royaume-Uni n’a plus que 50 navires de combat en service pour un tonnage cumulé de 354.030 mais reste devant la France qui n’est que 7ème, avec 70 navires de combat en service mais seulement 253.950 tonnes – ce qui signifie que la France a plus de patrouilleurs et de petites unités que le Royaume-Uni. Soulignons que le Royaume-Uni et la France font parti des pays qui perdent régulièrement des places au classement mondial : en 1988 le Royaume-Uni était 3ème et la France 4ème ; en 2024 le Royaume-Uni est passé 5ème et la France 7ème (talonnée par la Corée du Sud et par l’Indonésie)…

L’Inde est venue s’intercaler en 6ème position en 2024, avec 121 navires de combat en service pour un tonnage de 323.790 : 2 porte-aéronefs, 2 sous-marins stratégiques, 17 sous-marins d’attaque, 34 grands bâtiments de combat, 7 petits bâtiments de combat, etc.

corvette russe

Les Marines de guerre sont non seulement un indicateur avancé des capacités militaires d’un pays mais aussi un élément très important d’appréciation de sa crédibilité dans le domaine géopolitique.

Il est important aussi de regarder la production industrielle et les mises en services de bâtiments depuis 2022 pour mesurer les priorités de certains pays par rapport à d’autres.

Dans ce domaine, bien évidemment, la Russie a fait un gros effort de rattrapage depuis 2022, la Chine et les États-Unis continuent sur leur lancée de production, l’Indonésie, la Corée du Sud, le Japon, l’Inde et le Bangladesh confirment leurs préoccupations respectives dans cette partie du Monde.

Pendant ce temps-là, la France a du mal à tenir son rang et le Royaume-Uni est disqualifié…

Les pays de grandes Marines sont aussi des pays producteurs de matériels (chiffres 2022/2023) : Etats-Unis 36 unités livrées (pour une valeur de 20.8 MM$), Chine 26 (pour 16 MM$), Russie 22 (3.8 MMS), Inde 21(7.6 MM$), Japon 15 (3.2 MM$), Italie 14 (7.6 MM$), Indonésie 13, Allemagne 12 (5 MM$), France 11 (5 pour la Marine française et 6 pour l’exportation pour un total de 4 MM$), etc.

Les Vœux de Pierre Eric Pommellet, Président du Gican

pierre Éric pommellet

Le Président du GICAN a rappelé la solidité de l’industrie navale et maritime française mais qu’elle restait toutefois sous tension, notamment pour les PME et les TPE de la filière.

Il a rappelé que si l’industrie navale et maritime restait un secteur innovant, dynamique et en légère croissance, son excellence opérationnelle devait aussi être encouragée car il existe actuellement des signaux d’alerte inquiétants : l’activité et par voie de conséquence les investissements sont ralentis.

Rappelant que l’industrie navale aussi bien civile que militaire se situait dans le temps long, Pierre Eric Pommellet a rappelé aussi que le secteur avait besoin de stabilité, notamment pour le naval de défense. Il convient d’assurer la stabilité des commandes publiques en garantissant la LPM (Loi de Programmation Militaire) pour soutenir le champ des innovations technologiques.

Le Président du Gican a alerté sur « la fragilité des entreprises du secteur, tout particulièrement les TPE et PME, qui constituent le cœur de notre tissu industriel et qui subissent de plein fouet les effets de l’inflation, de la hausse des coûts des matières premières et des approvisionnements. La trésorerie de nombreuses structures est mise à rude épreuve et les défaillances se multiplient. C’est un signal d’alarme pour l’ensemble de la filière : préserver notre industrie navale, c’est protéger l’emploi, l’innovation et la résilience économique de notre pays ».

Pierre Eric Pommellet a appelé les entreprises du secteur naval à mieux travailler en filière, comme sait le faire l’industrie aéronautique, précisant au passage que 90% de la supply chain des grands ensembliers était française.

Et il a conclu : « Restons unis, audacieux et innovants pour que notre industrie continue à occuper une place de premier plan sur toutes les mers du globe »…

Espérons donc que le gouvernement français entendra cet appel et y répondra autrement que par des paroles…

AE

*tonnage : le tonnage d’un navire permet de mesurer sa capacité d’emport d’hommes et de matériel à pleine charge

Crédits photos: META, AFP, Naval Group